En dépit des frustrations et insatisfactions exprimées par les jeunes[1], le désespoir ne semble pas les caractérise pas, loin de là ! Les jeunes aspirent au collectif dans leur vision de la société, bien que leurs comportements personnels montrent des tendances individualistes et d’isolement, influencés par la technologie et la désinformation.

Le sondage Odoxa pour Synopia et Mascaret réalisé en novembre 2023 révèle ainsi un certain optimisme parmi les jeunes : plus de 8 sur 10 se disent « heureux dans la vie » et plus de 6 sur 10 « optimistes pour l’avenir », soit 12 points de plus que la moyenne française. Ensuite, loin de manquer de solidarité, les jeunes sont bien plus prêts que les autres à s’engager. Certes, ils ne croient pas à la politique et s’abstiennent massivement de voter (42 % des 18-24 ans), mais plus de 8 sur 10 (81 %) sont prêts à s’engager dans une cause associative. 

Mais la jeunesse n’est pas épargnée par l’archipélisation de la société et les intervenants ont tous souligné la diversité de la jeunesse. Il n’y a pas une jeunesse, mais des jeunesses et une multitude d’expériences.

Aujourd’hui, les jeunes font face à un contexte complexe avec des crises multiples telles que la pandémie, les tensions géopolitiques et le changement climatique. En outre, les jeunes sont préoccupés par des enjeux fondamentaux tels que la paix, la prospérité, et l’avenir de la planète. Mais ils sont aussi soucieux d’enjeux sociaux et économiques tels que le pouvoir d’achat, la santé, et la précarité croissante chez parmi les étudiants issus de milieux modestes.

Toutefois, en dépit de ces inquiétudes légitimes, une majorité de jeunes déclare être fière d’être français, ce qui tendrait à montrer la confiance qu’ils ont dans la capacité de notre pays à faire face aux défis.

Les aspirations de la jeunesse engagée dans des études supérieures incluent une société plus simple, moins segmentée et plus écologique, avec une attention portée accent sur les entreprises valorisant les collaborateurs et les actions durables.

Au niveau européen, des préoccupations communes émergent, notamment l’équilibre entre vie personnelle et travail, la préservation de la santé, la protection de l’environnement et le respect des droits humains.

Quelles sont les aspirations des jeunes dans le monde professionnel ?

Ce fut l’une des questions centrales de l’Académie Synopia. Plusieurs enseignements sont ressortis.

Tout d’abord, les jeunes recherchent l’épanouissement, la demande d’écoute, l’autonomie et un équilibre entre le temps de travail et le temps personnel. En outre, la crise du COVID-19 qui leur a « volé » près de 2 années, a renforcé la « conscience de la mortalité », conduisant à une quête de sens au travail et à la recherche d’une meilleure qualité de vie.

Dès lors, les jeunes privilégient des entreprises engagées socialement et écologiquement, ce qui provoque un « turnover » accru et une dégradation de la fidélité à l’entreprise. Surtout, ils sont méfiants vis à vis de tout ce qui s’apparente à des institutions – y compris les grandes entreprises – qu’ils assimilent au « pouvoir en place », par essence abusif, comme l’est celui du Politique. Paradoxalement, ils semblent en même temps souffrir de la dissolution progressive du « collectif » dans la société actuelle. 

L’entrepreneuriat responsable se développe rapidement et les entreprises qui donnent du sens et qui ont des pratiques socialement et environnementalement responsables attirent les meilleurs talents. Également facteurs de confiance auprès de la jeunesse, les secteurs de l’ESS et du privé non lucratif dont les modèles juridiques et économiques favorisent par construction un partage de la valeur plus équitable et le respect de toutes parties prenantes.

Les jeunes favorisent des relations horizontales et égalitaires au sein de l’entreprise, remettant en question le rôle du middle management. Celui-ci est conduit à se réinventer à l’aune des nouvelles attentes de la jeunesse.

Un des axes très prometteurs pour bien insérer les jeunes dans le monde du travail se situe autour de la formation professionnelle. En effet, elle est cruciale pour favoriser l’épanouissement des individus mais également pour préparer les inévitables étapes de reconversion ou d’adaptation aux nouveaux métiers. Surtout, elle devient clé pour faciliter la mobilité professionnelle dont on de plus en plus besoin les jeunes dès les premières années de leur vie active.

De son côté, l’apprentissage connaît un succès croissant, mais des défis subsistent, notamment la mobilité dans les bassins d’emploi défavorisés. 

Des changements législatifs et des réformes éducatives sont en cours pour lutter contre le déterminisme social et renforcer la cohésion sociale, comme l’a rappelé la Ministre Carole Grandjean, en charge de l’enseignement et de la formation professionnels

Par ailleurs, en matière d’attractivité, des obstacles « culturels » émergent pour les entreprises, en particulier le rejet de certaines activités industrielles.

Inclusion et cohésion : une exigence renouvelée

L’Académie Synopia a mis en avant le coût du décrochage. En effet, la société supporte un coût élevé (230 000 euros/personne tout au long de sa vie) lorsque des jeunes décrochent de leur formation. Des associations tels que TADAM[2] réalisent des actions spécifiques pour lutter contre ce phénomène, comme les semaines « d’accrochage scolaire » qui visent à redonner confiance et orientation aux jeunes.

Autre enjeu : les jeunes issus de l’aide sociale à l’enfance, souvent placés en famille d’accueil ou en centres d’éducation, sont souvent victimes de violences, et 70 % d’entre eux quittent la scolarité. Des approches spécifiques, y compris le mentorat et l’apprentissage de compétences informatiques, sont nécessaires pour les intégrer.

Concernant le handicap au travail, il y a aussi un besoin d’amélioration. Point positif : la formation aux métiers du numérique est adaptée pour les jeunes en situation de handicap, contribuant à l’emploi de plus de 50 % d’entre eux. Des structures comme Handitech[3] avec leurs projets innovants soutiennent cette démarche, générant des retombées positives pour l’ensemble de la société.

De l’éco-anxiété à l’éco-responsabilité !

La jeunesse, préoccupée par la crise environnementale et sociale, milite en faveur d’une réforme des fondamentaux de la société actuelle, remettant en question l’anthropocentrisme et l’exploitation de la nature. Devenue « éco-anxieuse », la jeunesse veut imposer un changement systémique et veut aller vite.

Cependant, elle se heurte à plusieurs obstacles comme le « principe de réalité », le coût et l’acceptabilité sociale de la transition mais également un clivage générationnel, en particulier avec les populations aux convictions politiques conservatrices. Même s’ils veulent aller vite, les jeunes se disent conscients de la nécessité d’intégrer l’aspect social à toute action environnementale, pour préserver la cohésion sociale.

En ce qui concerne l’énergie, la jeunesse préconise la sobriété, l’éducation aux conséquences du changement climatique et la promotion des énergies renouvelables. 

Des institutions telles que la Banque de France ont bâti leur stratégie RSE autour de la préservation de l’environnement, de l’inclusion, des achats et de l’investissement responsables, notamment.

De leur côté, des fournisseurs d’énergie comme EDF, ENEDIS et TotalEnergies s’engagent dans des initiatives majeures et durables mais sont obligés de prendre en compte la dimension progressive de la transition énergétique afin d’éviter les pénuries et de préserver la compétitivité de l’économie.

Des tensions subsistent, notamment en ce qui concerne l’image de TotalEnergies, malgré ses efforts de décarbonation jugés trop lents par la jeunesse. 

Pour sa part, EDF souligne sa responsabilité dans la production d’électricité décarbonée et la nécessité d’investissements massifs pour l’évolution vers des sources d’énergie plus propres. Enedis quant à elle met en avant ses efforts pour décarboner les raccordements électriques, favorisant le déploiement des énergies renouvelables sur le territoire.

Conclusion 

Les interventions de l’Académie Synopia ont toutes mis en avant la diversité de la jeunesse ou plutôt des jeunesses, en France, en Europe et dans le monde et permis de mieux comprendre leurs attentes et leurs inquiétudes. Elles sont aussi nombreuses que diverses : confort de vie, tâtonnement dans les premiers emplois, inclusion, handicap, soucis de l’autre, problèmes sociaux-économiques, éco-anxiété, etc. Toutefois, c’est bien l’optimisme et l’envie de relever tous ces défis ensemble et entre générations qui a caractérisé l’évènement et l’ensemble des interventions.

Contrairement à l’imaginaire collectif, les jeunes sont moins individualistes et égocentrés que le pense le reste de la population. Le sondage Odoxa pour Synopia et Mascaret révèle ainsi que les jeunes sont bien plus attentifs que les autres classes d’âge aux causes éminemment altruistes et accordent une place singulière à l’éducation (+ 15 points par rapport à la moyenne nationale) et à l’environnement (+ 9 points).

En revanche, un consensus se dégage dans l’opinion pour estimer que la société ne se soucie pas assez des jeunes : les trois-quarts des Français sont persuadés que la jeunesse est la grande laissée pour compte des politiques publiques.

ZOOM sur l’atelier d’intelligence collective du 26 octobre 2023 !

Dans le cadre de l’Académie Synopia – Hauts-de-France, Synopia et son partenaire Ecoposs ont organisé le jeudi 26 octobre 2023, un atelier d’intelligence collective ayant pour thème « Cohésion & Jeunesses ».

PPendant toute une journée, 40 jeunes venus d’horizons différents (EFAP, Université Catholique de Lille et IEM Collectif Dabbadie) ont expérimenté en matinée la « fresque des nouveaux récits » qui invitent les participants à créer un futur désirable et l’après-midi un hackathon s’est déroulé pour créer des solutions concrètes à mettre en œuvre pour esquisser cet « autre demain ». 

Ce travail collectif a fait l’objet d’une restitution par les jeunes lors de l’Académie Synopia du 21 novembre 2023.

La fresque des nouveaux récits est une association qui vise à faire émerger ce futur compatible avec les limites planétaires et désirables pour tous grâce à l’imagination de nouveaux récits. L’atelier propose d’explorer le pouvoir de transformation des nouveaux récits à l’échelle de l’individu, comme à celle des organisations. Cette étape a permis aux étudiants de pouvoir imaginer leur propre récit. 

Lors de cet atelier, 4 thèmes ont ainsi émergé : 

  1. Permettre une information authentique 
  2. Rendre la réussite possible via une orientation réussie
  3. Rendre accessible l’habitat participatif et éco-responsable
  4. Sécuriser l’espace public 
  5. Rendre l’accès à l’emploi plus accessible

[1] 18-34 ans.

[2] Depuis 2013, l’association TADAM permet à chaque jeune de connaître ses motivations profondes et de prendre confiance en lui.

[3] La Handitech est le premier écosystème qui encourage la création de technologies innovantes au profit des personnes en situation de handicap.