Cette « drôle de campagne » s’achèvera dans quelques jours et la France aura un nouveau Président. Quel que soit l’heureux élu, en l’état du climat de défiance entre gouvernants et gouvernés, il apparaît évident que sa base de légitimité sera étroite, et sa capacité à entraîner le pays sur la voie du renouveau, trop faible.
A la vérité, le système démocratique tel que nous le pratiquons est à bout de souffle. Les difficultés qu’ont eues les gouvernements successifs pour faire adopter leurs réformes (ou échouer à le faire) en témoignent. Elles sont d’origines multiples et proviennent à la fois de nos institutions, des élus et de leur façon de faire de la politique, et du numérique qui détiendra bientôt le potentiel d’entraîner le renversement d’un système rigide, marqué par le manque d’écoute, conçu pour gouverner par le haut et finalement, peu capable de penser et peser sur le temps long.
De nombreux observateurs ont, de longue date, fait le constat des dysfonctionnements du système de gouvernance démocratique, dysfonctionnements qui ne sauraient être simplement réglé par quelques réformes touchant aux organes constitutionnels. Qu’il faille réduire le nombre de parlementaires, c’est vraisemblable ; resserrer le gouvernement, c’est probable ; supprimer quelques comités Théodule, c’est certain.
Mais ces propositions, dont certaines figurent dans les programmes des candidats – et il faut s’en réjouir, car c’est la première fois que le débat s’ouvre autant sur le sujet de la gouvernance –, ne seront pas suffisantes pour restaurer l’autorité de l’État, rétablir la confiance et revivifier le lien démocratique. Autant de principes indispensables pour rendre le pays gouvernable.
Dans le même temps, nous voyons sur le terrain, à travers l’extraordinaire floraison d’initiatives citoyennes dans tous les domaines (environnement, solidarité, entrepreneuriat civique, etc.), la soif que montrent les Français à participer à la vie publique, et à s’engager en faveur de l’intérêt général. Ils donnent chaque jour des preuves concrètes de leur générosité et de leur enthousiasme à servir leur pays et leur prochain, loin des querelles d’appareil qui constituent à leurs yeux l’essentiel d’une vie politique dont ils s’éloignent chaque jour davantage. Nos concitoyens, s’ils sont prêts à s’engager, ne croient plus aux injonctions venues « d’en haut » et émanant d’autorités perçues comme déconnectées et donc illégitimes. Ce qui tend à renforcer l’idée que la gouvernance doit s’entendre comme la capacité à susciter une vision partagée, et à développer sa mise en œuvre en réseaux.
C’est pourquoi nous sommes convaincus que le prochain Président de la République serait bien avisé de réunir dans les meilleurs délais un « Grenelle de la démocratie », ouvert à toutes les parties prenantes (gouvernement, élus et maires, associations et ONG, société civile, etc.)
Ce « Grenelle de la démocratie » serait d’abord destiné à poser les bons diagnostics sur les problèmes de gouvernance de la France, à évaluer les attentes des Français et à prendre la mesure de la révolution numérique, pour ensuite proposer un ensemble complet et consensuel de réformes propres à redonner aux citoyens la confiance dans « l’essentiel », et la conscience qu’un destin commun peut être crédible, porteur de sens et de fraternité, en un mot, enthousiasmant.
Il ne s’agit pas de réunir une « constituante », ou de modifier les équilibres entre les organes de la « superstructure ». L’enjeu consiste d’abord à poser les questions de fond : le rôle de l’État, le rôle des collectivités territoriales, le rôle des citoyens et la prise en compte du numérique, afin de parvenir à un bon équilibre entre la démocratie représentative et la démocratie participative, en prenant bien en considération le régalien, le temps long et le temps politique, la subsidiarité et les dynamiques de co-construction fondées sur l’intelligence collective, l’expérimentation et l’engagement.
Ensuite, il conviendra d’examiner les nombreuses propositions qui, à droit constant pour beaucoup, permettront de bâtir un système de gouvernance plus vertueux, plus efficace et plus éthique, avec un meilleur équilibre des pouvoirs, une participation citoyenne organisée et une vraie dynamique de renouvellement. A titre d’exemple : le retour au septennat (unique), la création d’un système de « petition » comme en Angleterre via le site du Parlement, la vraie reconnaissance du vote blanc, la proportionnelle (dose), le nombre et statut des élus, le non cumul des mandats dans le temps, pas de retour en politique pour les anciens Présidents, pas de ministre sans administration, l’éthique dans la vie publique et la prestation de serment des élus, la mission des ministres et le rôle des cabinets ministériels, la fabrication de la loi (loi annulée si pas de décret sous 3 mois) et le contrôle de son application, les assemblées consultatives citoyennes, etc.
C’est à résoudre concrètement ces questions complexes mais essentielles, en assumant les réalités telles qu’elles sont, que devra s’attacher le « Grenelle de la démocratie ».
Dans ce monde incertain et de plus en plus difficile à déchiffrer, et dans cette Europe qui attend de la France le plein exercice de ses responsabilités, notre pays doit se doter d’un système de gouvernance moderne, démocratique et efficace, capable de relever les grands défis du XXI° siècle, et qui soit à même de rivaliser avec les grandes puissances et les régimes autoritaires.
Issus d’horizons différents et de sensibilités diverses, les signataires de cet appel enjoignent les candidats à l’élection présidentielle de 2017 à reprendre à leur compte cette proposition, et à la mettre en œuvre dès septembre prochain.
Les 110 signataires de l’appel, en date du mercredi 19 avril 2017
- Pierre d’Amarzit
- Jean d’Amecourt (ancien ambassadeur)
- Agnès Ameil
- Charles-Henri d’Aragon (ancien ambassadeur)
- Éric Arbillot
- Valérie Asselot (Executive coach)
- Gille Attaf (Smuggler, made in France)
- Christine Bardinet
- Sandy Beky (IMV Partners))
- Henri Bentégeat (Général)
- Victoire Binson
- Magaly Bocquet (physicienne)
- Feila Boucherit (avocat, cabinet Lexina)
- Katia Boursas (avocat, cabinet Lexina)
- Nicolas Bouzou (économiste et essayiste)
- Ghaleb Bencheikh (islamologue)
- Jean-Louis Bruguière
- Cécile Calé Bahoken (chercheur en philosophie politique, Cercle Spiridion)
- Catherine Cervoni (Consultante RP)
- Corinne Champagner-katz (avocat)
- Violaine Champetier de Ribes (Le Meunier Qui Dort)
- François de Closets
- Anthony Contat (co-fondateur société Tie-Up)
- Jean-Louis Costes (député)
- Nathalie Coutard
- Benjamin Des Gachons (change.org)
- Laurence Debray
- Isabelle Dejeux (Allison Partners)
- Bobby Demri (GOV)
- Olivier Descosse (avocat et écrivain)
- Irène Dupoux-Couturier (SoL France)
- Sergine Dupuy (entrepreneur)
- Fatima El Ouasdi (présidente-fondatrice de Politiqu’elles)
- Anne-Marie Escoffier (ancienne ministre)
- Vladimir Fédorovski (écrivain)
- Jérôme Ferrier
- Marie-Caroline Ferry (chef d’entreprise)
- Pascal Flamand (ancien éditeur)
- Sandrine Fouillé (Experte marketing & digital)
- Jack Germain-Robin
- Laurent Grandguilaume (député)
- Mickaël Guerin (Consultant Expérience Client et #AdnCitoyens)
- Stéphane Guyot (Parti du vote blanc)
- Richard Hasselmann (Libr’Acteurs)
- Phlippe Hayat (entrepreneur)
- Eric Holzinger (Commerce Coopératif et Associé)
- Bernard Hourcade (directeur de recherche au CNRS)
- Jacky Isabello (Coriolonk)
- Denis Jacquet (Parrainer la croissance)
- Louis-Marc Jacquin (notaire)
- Clémence Jafari (cadre juriste)
- Emmanuel Jaffelin (philosophe)
- Alexandre Jardin (écrivain, Les Zèbres et la Maison des Citoyens)
- Alexandre Jost (Fabrique Spinoza)
- Béatrix Jounault (Fabrique Spinoza)
- Alain Juillet (CDSE)
- Léonidas Kalogeropoulos – Ethic
- Marie Khayat (Directrice Marketing & Transformation Digitale)
- Laure Kepes (experte éditoriale)
- Gaspard Koenig (GenerationLibre)
- Karine Lazimi Chouraqui (assureur)
- Élisabeth Laurent (Consultante education/formation)
- Gilles de Labarre (Solidarités nouvelles face au chômage)
- Armel Le Coz (co-fondateur de Démocratie Ouverte)
- Martine Le Jossec (Consultante Stratégie Digitale)
- Grégoire Leclercq (Observatoire de l’uberisation)
- Emmanuelle Leneuf (Flashtweet)
- Patrick Levy-Waitz (Fondation Travailler Autrement)
- Séverine Lienard (Directrice commerciale)
- Fabrice Lorvo (avocat, associé cabinet FTPA)
- Alexandre Malafaye (Synopia)
- Charlotte Marchandise
- Xavier Marchal (ingénieur général)
- Thierry Marx
- Bertrand Merville (Avocat, cabinet de La Garanderie)
- Julien Miro (5 ans pour des idées)
- Patrice Molle (préfet honoraire et dirigeant de PME)
- Coryne Nicq (Directrice Communication)
- Holly Niemelä (Experte Wellness)
- Anne Nivat (grand reporter)
- Nathalie Ollier (Responsable marketing relationnel)
- Florent Parmentier (enseignant à Sciences Po/HEC)
- Christine de Panafieu (Cosight)
- Camille de Peretti (écrivain)
- Gilles Picozzi (école supérieure de gestion et d’expertise comptable)
- Pascal Picq (anthropologue)
- David Pouyanne (Groupe DPG-DELTA)
- Florence Provendier (Un Enfant par la Main)
- Yann Queffelec (écrivain)
- Philippe Rambaud
- Louisa Renoux (Directrice Pilotage et Ressources)
- Lana Richard
- Robin Rivaton (essayiste)
- Philippe Robinet (éditeur)
- Sylvie Rostain (événementiel culturel)
- Philippe Rozenpick (avocat, cabinet Desfilis)
- Marie Rui
- Véronique Rui (professeur de français)
- Amir Sharifi (président de Fondation)
- Jean-Marc Schaub
- Emile Servan-Schreiber (Hypermind)
- Joséphine Staron
- Philippe de Suremain (ancien ambassadeur)
- Jo Spiegel (Maire de Kingersheim)
- Bertrand Soubelet (Général)
- Bernard Vanneste
- Vanessa Vincent (Directrice marketing & Digital)
- Alain de Vulpian (ethnologue)
- Boris Walbaum (Courage politique)
- Jean-Philippe Wirth (général)
NB : les informations entre parenthèses sont données à titre indicatif ; elles n’ont pas vocation à engager les organisations mentionnées.
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