Retrouvez la tribune d’Alexandre Malafaye sur le site de l’Opinion.
Ceux qui militent pour la prise en compte du vote blanc attendent des preuves d’amour du Président de la République.
« Je veux que les courants d’opinion soient mieux entendus dans leurs diversités, une loi électorale plus juste, la prise en compte du vote blanc et même que soient admis à participer au débat des citoyens n’appartenant pas à des partis ». L’évocation du vote blanc dans l’allocution du président de la République était inattendue. La promesse de « sa prise en compte » ne figurerait pas dans le programme du candidat Macron et c’est la première fois qu’un chef de l’Etat indique qu’il va engager une réflexion sur le sujet. « Nous savons que ce n’est pas dans son logiciel, que les événements l’obligent à prêter attention à un sujet qu’il ignorait encore au mois de novembre, juge Olivier Durand, président de l’Association pour la reconnaissance du vote blanc. Si le Président veut reconquérir une part d’estime des Gilets jaunes, il faudra qu’il se montre ambitieux. Qu’il arrête de multiplier les réformes du statut de l’élu et qu’il lance une grande réflexion sur le statut de l’électeur ».
Pour l’instant, on ne sait pas très bien ce qu’Emmanuel Macron veut faire dans le domaine. Les mots « prise en compte du vote blanc » ont déjà été employés, notamment par l’UDI et le PS en 2014. « Ils ont détourné cette formulation en parlant de meilleure comptabilisation des bulletins blancs pour simplement les distinguer des bulletins nuls », regrette Olivier Durand. Un premier pas a tout de même été fait par la loi du 21 février 2014 « visant à reconnaître le vote blanc », qui entérinait le principe selon lequel ce type de suffrage n’avait rien à voir avec le vote nul. Le premier étant manifestement apparenté à une forme civique de neutralité, tandis que le « vote nul » est supposé provenir de citoyens peu responsables. Désormais bien identifiés, ces suffrages ne sont toujours pas comptabilisés.
Bouleversement. Jusqu’ici, les politiques s’y sont opposés en utilisant un argument quelque peu fallacieux. En 2015, l’Assemblée nationale s’est ainsi opposée à la fabrication de bulletins blancs, en arguant que cela coûterait trop cher à l’Etat. A côté des 12 milliards d’euros mis sur la table aujourd’hui, l’argument ne tient pas vraiment. Ce que craignent les politiques, c’est le bouleversement que provoquerait la comptabilisation des votes blancs dans les résultats électoraux. « Je pense qu’il faudrait les prendre en compte pour le premier tour de l’élection présidentielle. Si le vote blanc dépassait un seuil par exemple de 30 %, il faudrait recommencer l’élection dans les trois mois qui suivent », explique Alexandre Malafaye. Pour le président du think tank Synopia, cela aurait deux effets. Le premier, serait d’obliger les candidats à présenter une offre plus audible, plus crédible, plus fédératrice. « Le deuxième, très important dans l’optique de l’élection présidentielle de 2022, serait sans doute de limiter la progression des votes en faveur des partis extrêmes car les gens qui votent pour eux n’adhèrent pas forcément à leurs programmes », poursuit Alexandre Malafaye.
Si en Inde le débat sur le sujet est virulent, seules la Mongolie et la Colombie intègrent pour l’instant le vote blanc dans les résultats électoraux. Cela peut donner des résultats spectaculaires. Dans la ville de Bello (535 000 habitants), un candidat à la mairie qui se présentait pourtant sans adversaire, a été rejeté en 2011 par une majorité de 56,7 % de votes blancs et n’a pas pu se représenter. Six nouveaux candidats sont apparus, l’un d’entre eux a été élu, les votes blancs ne représentant cette fois que 5 % des suffrages exprimés.