Le 16 juin 2016 dans le Huffington Post
Un peu partout dans le monde, les vraies démocraties sont bousculées et leur gouvernance remise en question. Les critiques du modèle ne sont pas nouvelles, mais force est de constater qu’un pays s’accommode mieux de la médiocrité démocratique en période faste qu’en situation de difficulté, ou de crise. La démocratie n’est pas en cause, ce sont les systèmes institutionnels qui tuent la démocratie à petit feu.
Dans le cas particulier de la France, le mal est profond car l’État y joue un rôle plus important qu’ailleurs. Les défaillances du système se traduisent par des politiques publiques de plus en plus désordonnées, nombreuses, inscrites dans le court terme, souvent dictées par l’émotion, et pas toujours efficaces. Conséquence directe, la montée des populismes, qui sont attisés par tous les dévoiements visibles du système. La liste des maladies politiques est longue et vient directement flétrir l’image de la classe politique dans son ensemble, au point que le lien de confiance entre les Français et leurs représentants est cassé.
Peut-être est-il enfin temps d’admettre que les dispositions du système démocratique français ont été édictées sans un minimum de recours à l’anthropologie. L’expérience démontre que les systèmes de gouvernance les plus efficaces ont toujours pris en compte la réalité de la nature humaine, avec ses forces et ses faiblesses. De la corruption généralisée à l’intelligence collective, il n’y a qu’une différence de règles du jeu.
Le paradoxe des institutions françaises
On entend souvent dire que les institutions de la Ve République sont solides. S’il s’agit de protéger tous ceux qui vivent à l’intérieur du système de toute forme de remise en cause sérieuse, y compris lorsqu’elle touche à son essence – la légitimité des dirigeants et des corps intermédiaires – alors oui, elles sont très solides. Mais si le système n’avait pas été pensé comme une fin en soi, il protégerait le peuple de la plupart des formes de dévoiement actuelles et des abus de pouvoir.
Le mot gâchis est le premier qui vient à l’esprit quand on regarde ce qu’il est advenu de la France, une nation au potentiel si fort. Le débat public n’est plus à la hauteur des enjeux et la classe politique, qui compte pourtant bien des talents, ne paraît plus capable de dépasser le stade des guerres partisanes ou électorales dans lesquelles seule paraît compter la survie politique de ceux auxquels les Français -à tort ou à raison- ne croient plus.
Le temps de l’ingouvernance
Les autres démocraties occidentales n’échappent pas aux turpitudes démocratiques. Les dérives sont parfois contrebalancées, ou amoindries, par l’organisation du pouvoir, et sa répartition, entre les niveaux national, régional et local. Mais en France, l’hypertrophie du pouvoir central, fruit d’une longue histoire, amplifie l’ingouvernance du pays et son immobilisme. Trop éloigné des réalités et du monde économique, absorbé par d’interminables débats idéologiques, incapable de voir large et de formuler les bons diagnostics, le haut de la pyramide française tourne à vide. Pris au piège de ses logiques internes, il croit encore pouvoir tout régenter par le haut et ne cesse d’en appeler au dieu Loi pour résoudre les problèmes du bas monde et relancer la croissance avec des dispositifs toujours plus complexes.
2017, l’élection de la dernière chance
Paradoxalement, ce défaut de « grosse tête » constitue peut-être notre dernière chance, qui fait peser sur les épaules du prochain président de la République une responsabilité historique, inédite depuis 1958. Il doit prendre la mesure de ce qui l’attend et ne surtout pas croire que son élection lui confèrera une quelconque légitimité. Il aura été élu parce qu’il faut bien élire quelqu’un, et que la mécanique institutionnelle aura fonctionné, comme une pendule à coucou dont l’oiseau sort de son nid à l’heure dite. Au soir de son élection, le nouveau chef de l’État aura tout à prouver tant est profond le déficit de confiance entre gouvernants et gouvernés, et l’impuissance publique avérée. Nous sommes entrés dans l’ère du sacrifice propitiatoire. Pour amorcer un début de retour à la confiance, le sang des pratiques coupables devra couler. C’est le prix à payer pour que les Français acceptent une dynamique de changement. Après avoir été tant déçus, ils ont besoin de voir pour croire.
Le droit des Français à être bien gouvernés
Réussir nécessitera d’avoir pleinement conscience que les Français ont le droit d’être bien gouvernés. Ce qui impose de rénover nos institutions et de moderniser les pratiques politiques.
Pour impulser cette nouvelle gouvernance, et pour restaurer la fonction politique dans toutes ses dimensions -légitimité, autorité, confiance, prise en compte de l’intérêt général et du temps long, capacité à transformer- SYNOPIA présente 25 propositions articulées autour de trois grands objectifs:
- « Dé-carriériser » la classe politique.
- Restaurer l’efficacité de l’action publique.
- Recréer le lien démocratique.
Les 25 propositions de SYNOPIA
I. Le président de la République
1 – Élire le président de la République pour un seul mandat.
2 – Revenir au septennat.
3 – Nommer le président sortant pour un mandat unique de 9 ans au Conseil constitutionnel.
II. Les 100 jours
4 – Convoquer le Parlement en session extraordinaire tout l’été 2017.
5 – Recourir au référendum en juin 2017 pour faire adopter plusieurs réformes clés.
6 – Recourir aux ordonnances jusqu’à l’automne 2017.
III. Le Gouvernement
7 – Annoncer la composition de l’exécutif avant l’élection.
8 – Limiter le gouvernement à douze ministères régaliens et figer leur périmètre.
9 – Geler le budget de fonctionnement du Gouvernement pendant la mandature.
10 – Rendre cohérentes les relations ministres / administrations.
11 – Créer un grand ministère du numérique.
12 – Ouvrir le gouvernement à la société civile, en recherchant la parité.
13 – Réformer en profondeur les cabinets des ministres.
IV. Le Parlement et les élus
14 – Réduire le nombre de députés à 340.
15 – Réduire le nombre de sénateurs à 200.
16 – Limiter l’exercice d’un mandat parlementaire à deux mandats consécutifs.
17 – Interdire le cumul des métiers, et le cumul avec d’autres fonctions électives.
18 – Contraindre les hauts fonctionnaires qui ont choisi la voie politique à démissionner de la fonction publique.
19 – Améliorer le dispositif permettant aux représentants de la société civile de s’engager en politique.
V. Fonctionnement du Parlement et fabrication de la loi
20 – Augmenter le temps consacré au contrôle de l’action du Gouvernement.
21 – Interdire à l’Assemblée de légiférer avant d’avoir évalué les lois précédentes.
22 – Annuler la loi votée si les décrets d’application ne sont pas publiés sous quatre mois.
23 – Lancer un vrai chantier de simplification législative.
VI. Évaluation des programmes, des lois et des résultats
24 – Créer une Fondation pour l’évaluation de l’action politique.
25 – Renforcer l’examen de la loi de règlement.
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