INTERVIEW réalisé par Albert ZENNOU
LE FIGARO. – Emmanuel Macron a la volonté de faire entrer de façon importante la société civile aussi bien au gouvernement qu’à l’Assemblée. Est-ce forcément une bonne idée ?
Alexandre MALAFAYE. – Sur le papier, il est toujours bon d’irriguer le champ politique avec des femmes et des hommes issus de la société civile. Ils apportent une vision et une sensibilité qui fait parfois défaut aux « professionnels » de la politique. Mais pour Emmanuel Macron, tout dépendra de la manière dont le renouvellement va être entrepris. En tout état de cause, mêler les deux mondes répond à une attente des Français et leur redonne de l’espoir dans la réussite de l’action publique. Une lame de fond parcourt la société. Les Français ont soif de participer à la vie publique et veulent peser davantage que par le passé sur les décisions, dans une dynamique de co-construction.
Comment trouver un équilibre entre ce modèle plus participatif et l’actuel qui est représentatif ?
Cet équilibre entre une démocratie plus directe et un modèle classique et régalien est le fruit d’un dosage très subtil. Il faut parvenir une hybridation démocratique. Un élément rend cet équilibre obligatoire à trouver : l’irruption du numérique dans la vie économique, privée, sociale et donc politique. Aujourd’hui, la digitalisation permet des avancées démocratiques certaines. Pour adhérer à En marche par exemple, un simple clic suffit. De même, les sites de pétitions en ligne s’avèrent efficaces,mais ce bouillonnement démocratique n’est pas canalisé, et ce n’est pas sans poser problème.
Cette volonté des Français d’avoir des élus plus proches d’eux
Il y a une attente profonde de meilleure représentativité. C’est ce qu’ont compris les élus locaux depuis très longtemps. Dans les équipes municipales par exemple, il y a une vraie diversité et les les postes à responsabilités sont souvent occupés par des professionnels compétents. Pas étonnant que les maires soient les élus préférés des Français.
Ce désir de renouvellement est sans doute fort. Mais par le passé, les tentatives ont surtout été des coups de com’.
Le renouvellement n’est pas une fin en soi. Faire entrer des personnes issues de la société civile sans leur donner les moyens d’exercer leurs fonctions ne produira pas de résultat. Pour un certain nombre, les nouveaux députés qui seront élus pour la République en marche seront forcément inexpérimentés. Si, en plus, ils ne sont pas dotés de moyens suffisants pour exercer leur mandat, ils risquent de faire de la figuration. Il en va de même pour les ministres s’ils n’ont pas le minimum de compétences requises.
Mais venir de la société civile n’est une garantie absolue de compétence.
Le renouvellement doit être absolument adossé à la compétence. C’est même la condition essentielle de la réussite. Le renouveau ne doit pas être qu’une affaire de communication. Le chef de l’État doit envoyer des signaux qui donneront un sens concret à l’action politique. Car en définitive, l’attente majeure des Français, qui ont été beaucoup déçus, ce n’est pas le renouveau pour le renouveau mais que les gouvernants et les élus s’occupent de leurs problèmes et qu’ils les règlent. Ils veulent des résultats !
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