Retrouvez l’interview d’Alexandre Malafaye sur le site web de La Ruche Média.
Les « gilets jaunes » rejettent les élus et le système de gouvernance global. Alexandre Malafaye reçoit François Hollande le 14 décembre pour un colloque autour du renouveau démocratique. L’occasion d’avoir le regard de l’ancien chef de l’État sur l’actualité. Le fondateur de Synopia nous dit tout sur cette journée et donne son avis sur le mouvement populaire et sur la gouvernance d’Emmanuel Macron.
- A 18 mois du début du quinquennat et à 24h d’une nouvelle journée de mobilisation, que dites-vous de la gouvernance du Chef de l’État ?
Le renouveau démocratique est le cinquième pilier du programme d’Emmanuel Macron. Sur ce sujet, il y avait une attente considérable et Emmanuel Macron bénéficiait d’un contexte favorable exceptionnel. Sans parler de la bienveillance qui a accompagné son élection. Tout le monde avait envie qu’il réussisse. Pourtant, avec Synopia, nous étions persuadés qu’il fallait traiter cet enjeu de renouveau démocratique en profondeur et de façon très concertée. Car ce que voyions et entendions du débat électoral était loin de nous convaincre. Je dirai même que la légèreté avec laquelle les candidats traitaient la question nous inquiétait. Comme toujours, les campagnes ne sont pas des temps favorable à la pensée politique. Il s’agit plutôt d’un mélange entre grand oral, foire d’empoigne et concours Lépine.
- Le vendredi 14 décembre, Synopia organise un colloque sur le renouveau démocratique. Pouvez-vous nous en dire plus ?
En avril 2017, nous avons lancé un appel en faveur d’un « Grenelle de la démocratie », signé par 125 personnalités. Et le 3 mai 2017, nous avons publié une lettre ouverte à Emmanuel Macron, pour qu’il s’engage à réaliser ce Grenelle. Tel ne fut pas la cas. Dès le lendemain de son élection, le 8 mai 2017, nous avons mis sur pied l’observatoire citoyen du renouveau démocratique, bien décidé à suivre les enjeux de gouvernance publique tout au long du quinquennat, de façon ferme et bienveillante.
- François Hollande sera l’invité d’honneur. A-t-il été difficile à convaincre ?
Sa présence n’est pas anodine, bien sûr. Surtout dans le contexte actuel. Mais il faut rappeler qu’il a pris la décision de participer à ces rencontres bien avant que la crise des gilets jaunes n’éclate.
Il a tout de suite manifesté de l’intérêt pour notre projet, car ces rencontres vont lui permettre de partager sa vision des grands principes que nos institutions doivent absolument préserver et de la démocratie vivante.
- Quel sera le déroulé de cette journée-rencontre ? Est-ce ouvert au public ?
Oui, cette journée est ouverte au public. Mais il est obligatoire de s’inscrire car nous serons au Palais du Luxembourg (Sénat) et les accès sont sécurisés. Voilà le lien :
La journée se déroulera autour de 4 tables rondes :
1. Le renouveau démocratique est-il réellement « en marche » ?
2. Réforme constitutionnelle : à quoi va ressembler la démocratie française ?
3. Renouveau démocratique : jusqu’où pousser l’innovation ?
4. Engagement politique et mandat électif : la politique peut-elle être une activité comme les autres ?
François Hollande interviendra à 9:00, puis répondra aux questions.
- Votre regard sur le mouvement populaire et inédit des #GiletsJaunes ?
La mèche est allumée et c’est très grave. Surtout, je redoute que ceux qui l’ont allumée ne soit pas en mesure de l’éteindre. Mais que voulez vous, après plus de trois décennies du mode Élection / Déception (ou trahison), il ne faut pas s’étonner que les Français commencent à se révolter. Car ils ont le sentiment d’être méprisés et que le pouvoir politique lui ment et qu’il ne sert à rien, si ce n’est à ponctionner le peuple de plus en plus. Une quantité incroyable de Français ne mange pas à sa faim, a froid chez lui et ne boucle pas ses fins de mois. Mais qui s’en soucie vraiment ?
Le plus triste, c’est que bien des signes ont annoncé la rupture de la corde entre les « premiers de cordée » et les autres. Par exemple, nous avons réalisé un baromètre Ifop / Synopia / Dentsu consulting fin septembre 2018 sur « les Français et l’engagement ». Parmi les résultats, deux sont sans appel pour Emmanuel Macron :
– 75 % des Français ne se sentent pas impliqués et engagés dans le projet de transformation du pays d’Emmanuel Macron
– Et 79% estiment que la méthode employée pour mener cette politique n’est pas de nature à mobiliser et entraîner les Français. Si le pouvoir actuel ne comprend pas que tirer un bord ne veut pas dire changer de cap, alors il fera naufrage.
- Quel sera le thème de votre prochain colloque ? Souhaitez vous le plus souvent coller à l’actualité ?
2019 sera une année dense pour Synopia. Nous organiserons les 2ème rencontres du renouveau démocratique et aussi un grand événement autour des enjeux de cohésion. Sur le fond, notre vocation n’est pas de chercher à coller à l’actualité. D’autres s’en chargent… Mais si l’actualité valide la pertinence de nos questionnements, tant mieux, cela récompense les membres de notre organisation qui s’investissent de façon bénévole et avec beaucoup conviction.
En pratique, nous essayons de prendre un peu de recul pour penser par delà la tyrannie du court terme et des échéances électorales. C’est ainsi que nous préparons ces premières rencontres du renouveau démocratique depuis le printemps 2018.