Le 30 juin 2016 dans le Huffington Post
L’impératif de vitesse, pour agir et obtenir les premiers résultats concrets et tangibles pour les Français, sera déterminant pour le prochain président de la République. La période dite « d’état de grâce », ces fameux 100 jours, vont conditionner l’ensemble du mandat. Ils constitueront un espace d’action politique majeur et, s’ils sont vraiment mis à profit pour fissurer le mur des corporatismes, ils empêcheront les mâchoires de l’immobilisme de se refermer pour cinq ans. Si rien ne vient déstabiliser les défenseurs du passé, un nouveau quinquennat à blanc nous attend, que rien n’interrompra, sauf une crise qui entraînerait la chute du régime, catastrophe qui pourrait bien survenir lors de l’explosion de la prochaine bulle financière ou monétaire.
Cette course contre la montre nécessitera un vrai courage politique, puisqu’il faudra s’attaquer aux blocages des corps intermédiaires qui, pour beaucoup, sont entraînés, souvent malgré eux, dans des logiques corporatistes. Les partis politiques figurent au premier plan de ces organisations qui font obstacle au changement, pensent pour nous et décident de qui aura le droit d’être élu, en haut comme en bas. Les syndicats, y compris patronaux, les talonnent de près, tout comme les professions protégées.
À la clé, il y a le début du retour de la confiance et l’amorce du renouveau de la puissance publique. Mais la fenêtre de tir sera étroite et tergiverser ne figurera pas au nombre des options. Le candidat devra prendra l’engagement de débloquer la France. Une fois président, il disposera de deux armes, les ordonnances et le référendum, toutes deux prévues par la Constitution.
L’engagement pendant la campagne
Au préalable, pendant la campagne, il aura dû prendre les Français à témoin de ses engagements et de la méthode d’action qu’il entend déployer. Ce qu’il mettra en œuvre doit être lisible et sans surprise. Dans son programme et tout au long de la campagne, il doit s’exprimer sur la nature des blocages de la société française, et expliquer pourquoi il recourra aux ordonnances et, sur certains sujets majeurs, au référendum.
Le référendum
Beaucoup affirment que l’arme du référendum est dangereuse et qu’elle pourrait bien se retourner contre son auteur, qui risquerait un vote anti plébiscite. Mais la plupart du temps, les pourfendeurs du référendum sont les champions de l’immobilisme. Pour eux, rien ne doit changer. Voilà pourquoi le référendum, instrument démocratique par excellence, leur fait peur. Si on leur en donnait l’occasion, les Français pourraient bien être tentés de mettre un coup de pied dans la fourmilière.
Cette fois, il s’agira de recourir au référendum dans la foulée des élections législatives qui suivront la présidentielle, en juin 2017.
Pour les Français, ce vote référendaire leur permettra d’être les acteurs du changement qu’ils veulent voir mis en œuvre. Main dans la main avec le président, ils confirmeront leur soutien aux grandes propositions destinées à débloquer la société française et à faire sauter les verrous qui ont cadenassé un système qui ne profite qu’à un nombre restreint de personnes, dans le public comme dans le privé. Le signal politique sera fort. Personne ne pourra se mettre en travers de leur volonté, aucun corps intermédiaire, aucune organisation, aucun parti, aucun syndicat, ne peut s’opposer au vote majoritaire des Français.
Ce référendum devra constituer un ensemble de mesures destinées à provoquer une « onde de choc » dont notre pays a besoin, afin de donner l’impulsion qui changera la trajectoire du navire.
Il devrait comporter un « paquet institutionnel », sur trois points, au moins:
- Le retour au septennat, avec mandat unique du président de la République.
- La réduction du nombre de parlementaires d’ici à 2022.
- La limitation à deux du nombre de mandats électifs consécutifs.
La définition des autres priorités reste à préciser par le candidat décidé à recourir au référendum. Il lui faudra choisir deux, voire trois, mesures supplémentaires susceptibles de libérer le potentiel français. La France dispose de tous les atouts pour être l’un des pays les plus prospères au monde, à condition d’inventer une nouvelle forme de prospérité, fondée sur un meilleur partage des richesses et des privilèges. Ce qui, une fois encore, obligera les aspirants au pouvoir suprême à définir une vision de la France. Où voulons-nous aller ensemble, et pourquoi ? Le comment en découlera logiquement.
Le recours aux ordonnances
Mais « l’arme fatale » du référendum anti conservatismes et anti corporatismes n’a qu’un coup. Pour transformer l’essai, il faudra profiter de la dynamique de la victoire, convoquer le Parlement en session extraordinaire tout l’été et recourir aux ordonnances jusqu’à l’automne, au moins. Il ne s’agit pas de contourner le Parlement, car il est constitutionnellement intégré au système des ordonnances, mais de faire preuve de pragmatisme au regard des interminables délais de procédures législatives qui sont souvent et savamment pollués par des milliers d’amendements. Il convient également d’agir rapidement, avant que « le matelas ne reprenne sa forme ».
Ce recours aux ordonnances, tout comme l’utilisation du référendum, devra faire l’objet d’un vrai travail de pédagogie sur la méthode de gouvernance tout au long de la campagne. Les Français ont bien compris qu’il faut cesser de croire au président père Noël. Ils savent désormais que campagne électorale rime avec foire aux promesses, intenables ou ruineuses pour la plupart. Surtout, les Français constatent chaque jour un peu plus, à leurs dépens, que la réalité dissimulée derrière les grands discours et les appels aux « valeurs de la République » est celle de l’impuissance publique. Ils sont donc prêts à entendre un discours de vérité sur les défaillances de nos institutions et parfaitement disposés à soutenir ceux qui proposeront une méthode de gouvernance efficace.
C’est ainsi que le prochain président réussira à briser les mâchoires de l’immobilisme. Notre Constitution le permet. Ensemble, le président et le peuple peuvent reprendre en main le destin de la Nation, comme ce fut le cas à partir de 1944 avec la mise en place du programme du Conseil national de la Résistance.
D’aucuns prétendront que la méthode est brutale. Vu de Paris, et du kilomètre qui entoure le palais de l’Élysée, l’argument peut porter, car le référendum, s’il est adopté, se sera pas sans conséquence sur les quelques milliers de membres de la « bourgeoisie d’État ». Mais au-delà de ce cercle, ne sont-ce pas les six millions de chômeurs, les neuf millions de pauvres ou encore les 2100 milliards d’euros de dette qui renvoient à l’idée de brutalité?
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