La barbarie a encore sévi
Alors que la France termine l’année dans un contexte social et sanitaire bouleversant et unique, la barbarie se réveille et continue de harceler le progrès et la liberté. D’un coup de lame, un monstre a décidé que les valeurs de la République devaient payer, qu’elles devaient être égorgées dans l’espace public, pour signifier à la France entière et à l’Occident que l’obscurantisme dispose de ses propres forces à l’encontre des derniers remparts de la liberté : nos enseignants.
C’est un hussard noir de la République qui en a payé le prix. Incarnation même d’une ambition lumineuse et universelle, l’école de la République est cet endroit où le véritable flambeau républicain devrait prendre tout son sens. Pour son plus grand malheur, c’est un enseignant libre qui sera la victime de la barbarie.
Un attentat orchestré par un soldat d’une idéologie fasciste, à peine majeur, sur fond de revendications religieuses porteuses d’un projet de société attardé.
La lâcheté des singes de la sagesse
Les meurtrissures de la devise républicaine forment désormais des plaies béantes qu’il est urgent de panser. L’ensemble des pouvoirs publics doit maintenant s’interroger sur le glissement progressif de la société française vers la dislocation de son socle social et politique.
Un glissement permis par la banalisation de la violence, l’individualisme grandissant, la disparition des lieux de vie collective, le manquement au devoir de mémoire, l’absence de réels chemins de mobilité sociale, la complicité clientéliste des pouvoirs politiques, et le déni d’une partie de la classe politique qui a préféré la lâcheté des trois singes de la sagesse*.
Ouvrir les voies
La République est de nouveau marquée au fer rouge. Pour autant, il faut se tourner vers l’avenir et faire enfin en sorte qu’un tel drame ne se reproduise pas. Plus jamais ça !
Il est donc grand temps que les pouvoirs politiques interviennent contre les dynamiques sécessionnistes qui cherchent à s’émanciper du cadre républicain (dont les porteurs sont bien plus divers qu’on peut l’imaginer), contre la prolifération de la haine et de la violence en ligne, et contre les ingérences étrangères notamment dans la lutte contre la radicalisation.
Parmi les dangers : le recrutement par Daech, via les réseaux sociaux, premier levier d’enrôlement de notre jeunesse. De nombreuses études dénoncent le rôle des réseaux sociaux dans le processus de radicalisation des jeunes français et européens. Ces plateformes sont utilisées comme vecteurs de propagande et d’endoctrinement à l’égard d’esprits fragiles et vulnérables. Se pose alors la question de la responsabilité de ces réseaux et du besoin d’accentuer le contrôle des contenus diffusés. Ces outils de massification de l’information et de l’expression représentent un danger réel pour la pérennité démocratique de nos institutions.
La prolifération des contenus violents, dont les spectateurs sont de plus en plus jeunes, parviennent à rendre la violence constitutive de notre cadre de vie. Elle devient une solution, une opportunité, une option, pour surmonter une difficulté ou pour répondre à la contradiction. La violence (et non plus le recours à la Justice) devient donc un outil valorisé, parfois privilégié, dans la participation à la vie sociale, qui se transforme souvent en défense d’une vie communautaire. La banalisation de la violence rentre alors en contradiction avec la vision démocratique de la vie en société, puisqu’elle comprend en elle le refus d’une pluralité d’opinions, et par conséquent, une impossibilité de développer l’esprit critique et l’autocritique.
Il est également urgent que l’activité des puissances étrangères sur le sol français soit beaucoup mieux contrôlée, notamment dans le financement des lieux de culte, où des pays par le biais d’ONG comme Qatar Charity apportent d’énormes financements. Une forme d’ingérence qui participe à la diffusion d’une idéologie totalitaire à caractère religieux, incompatible avec l’histoire républicaine française, et de manière générale, incompatible avec la démocratie.
Enfin, il est grand temps que nos institutions et notre société reconnaissent à sa juste valeur l’enseignement et soient solidaires des enseignants. Ces derniers, en proie à la dégradation des conditions de travail et à la baisse croissante du niveau des élèves, subissent souvent la pression des parents. Dans cette macabre histoire, des parents d’élèves, soutenus par des fondamentalistes islamistes, ont été reçus par la direction de l’établissement, après avoir qualifié de voyou sur les réseaux sociaux le professeur qui avait montré les caricatures de Mahomet, et allant jusqu’à réclamer son renvoi.
Comment peut-on accepter que de telles pressions s’exercent sur un enseignant ? A l’image des forces de l’ordre, un nouveau délit doit condamner les pressions et insultes avec plus de fermeté, en instaurant des circonstances aggravantes, quand elles touchent un professeur qui exerce son métier d’instruction et d’ouverture d’esprit. Les autorités doivent se montrer intransigeantes en soutenant les enseignants chaque fois qu’ils sont inquiétés alors qu’ils agissent dans le cadre de leur profession, donc dans le cadre républicain.
L’horrible meurtre de cet enseignant ne laisse plus de place au doute. L’omerta sur les questions de radicalisation des plus jeunes doit être brisée et nos représentants politiques doivent agir pour défendre envers et contre tous les valeurs de la République : Liberté, Egalité, Fraternité.
Par Romain Labiaule, membre de Synopia Jeunes.
*Les trois singes de la sagesse sont des symboles issus de la mythologie asiatique. Ils se couvrent respectivement les yeux, la bouche ou les oreilles. Le texte qui accompagne l’image des trois singes est le suivant : « De ce qui est contraire à la bienséance, ne pas regarder, ne pas écouter, ne pas le dire, ne pas le faire ».