Note de Synopia n°7 : Génération Covid : une génération sacrifiée ?

Synopia remercie ses membres pour leur contribution à cette note, notamment Laura Schaub et Beatriz de Leon Cobo, membres de Synopia Jeunes. Les étudiants sont dans le flou quant à leur avenir. Certains se demandent comment ils vont être sélectionnés pour leur entrée en première année et comment celle-ci se déroulera. D’autres se demandent comment…

Thème de réflexion :

Synopia remercie ses membres pour leur contribution à cette note, notamment Laura Schaub et Beatriz de Leon Cobo,
membres de Synopia Jeunes.

Les étudiants sont dans le flou quant à leur avenir. Certains se demandent comment ils vont être sélectionnés pour leur entrée en première année et comment celle-ci se déroulera. D’autres se demandent comment ils vont valider leur année d’étude et/ou session de rattrapage. Enfin, les étudiants en dernière année sont préoccupés par leur entrée sur le marché du travail et craignent de subir les mêmes conséquences qu’en 2008 lors de la crise économique.

Concernant l’enseignement supérieur, la crise du COVID-19 a été un accélérateur et oblige les écoles et universités à revoir leurs méthodes de fonctionnement, d’enseignement et de validation des acquis de leurs étudiants. Vraisemblablement, ils n’étaient pas préparés « au tout numérique » qui s’est imposé depuis plusieurs semaines.

En effet, il existe une fracture numérique dans l’organisation administrative de l’enseignement supérieur. Par exemple, la plupart des inscriptions se font encore par voie postale avec impressions des pièces justificatives. Le confinement a aussi obligé les enseignants à revoir leur façon de transmettre leur savoir et de créer du lien « digital » via des plateformes en ligne. Ces changements imposés exigent de leur part une attention accrue, et davantage de temps et de suivi en bilatéral, ce qui n’est pas toujours évident à mettre en place.

Mais durant cette période, l’innovation a été le maître mot. Les solutions aux inquiétudes et difficultés des étudiants et du monde de l’enseignement supérieur en général, ne peuvent être trouvées qu’à partir d’un échange entre plusieurs acteurs, notamment le trinôme fondamental entre l’État, l’enseignement supérieur et ses étudiants, et l’entreprise.

La coopération et la coordination sont indispensables. Face à tous ces enjeux, le pragmatisme doit prévaloir et quelques innovations de bon sens et peu coûteuses pourraient être mises en place. Les propositions de ce document sont une contribution à ce nécessaire effort d’adaptation de l’appareil de formation à des circonstances exceptionnelles.

1. La crise COVID-19 a mis en lumière la problématique du passage au « tout numérique ».

Concernant l’accélération de la numérisation de l’enseignement supérieur, plusieurs propositions peuvent être formulées, comme par exemple la mise en place des outils suivants :

• Une plateforme d’examen sécurisée et française : l’établissement devra se doter d’une plateforme personnelle et d’origine française pour faire passer les examens et protéger son patrimoine académique. Par ailleurs, pour assurer au mieux les conditions des examens via cette plateforme à distance, il est impératif de rétablir le lien de confiance entre enseignants et étudiants (certaines universités forcent les élèves à se filmer pour éviter toutes triches).

• Une hotline : une hotline téléphonique par université permettrait d’offrir aux étudiants un soutien moral et technique.

• Un soutien numérique aux étudiants : pour les étudiants qui n’ont pas accès à un ordinateur ou une bonne connexion internet, les mairies ou collectivités locales pourraient mettre à disposition des salles d’examens. Pour les étudiants habitant à l’étranger, les ambassades et consulats pourraient aussi mettre à disposition des salles d’examen.

• Des enseignements à distance : pour certaines formations, l’enseignement à distance existe déjà. Mais son accélération et sa généralisation permettraient aux étudiants qui n’ont pas toujours le budget suffisant pour louer un appartement et emménager dans une autre ville, de réduire leurs dépenses et leur assurerait un meilleur niveau de vie. Certains cours devront rester en présentiel pour maintenir le lien entre étudiants et avec les enseignants. De manière générale, afin de prévenir une autre crise et accélérer la digitalisation des cours, il faut capitaliser sur l’enregistrement des cours. Deux modèles de cours doivent coexister qui sont la diffusion en direct qui favorisera la participation des élèves, et l’accès à des cours filmés pour les étudiants qui n’ont pas pu accéder à celui-ci et qui auront la possibilité de les visionner a posteriori.

• Une formation adéquate des enseignants : la fracture numérique existe aussi au sein de la communauté enseignante qui n’ont pas tous les mêmes degrés de formation aux outils numériques et ne sont pas équipés de la même manière. Des salles devront être mises à leur disposition ainsi qu’une formation informatique en accéléré, réalisée par des professionnels. Les étudiants pourront être consultés par les enseignants pour co-construire les cours numériques de demain.

• Une formation des équipes administratives : Trop souvent, le système est archaïque et très peu numérique. Les universités et écoles doivent investir dans la formation et l’équipement de leur personnel administratif.

• Un accès numérique aux bibliothèques : L’accès numérique aux bibliothèques vient en soutien des formations à distance. Cet accès est primordial. Outre la numérisation de celles-ci, il faudra les ouvrir au plus vite avec un nombre de places limité, un maintien des distances sociales et un équipement sanitaire, afin de permettre aux étudiants d’avoir accès au savoir, à une connexion internet et à un poste informatique.

• Une bourse pour le numérique : dans certains foyers, l’ordinateur a un usage familial. Une bourse étudiante pour l’inclusion numérique permettrait d’équiper chaque étudiant d’un ordinateur portable. La décision d’attribution de la bourse peut se faire au niveau de l’établissement scolaire et au niveau des bourses départementales et régionales.

2. Pour les étudiants qui passent en année supérieure, l’une des problématiques centrales reste la validation de leur année par l’exercice d’un stage, généralement réalisé au cours de l’été.

Pour que les étudiants qui n’ont pas été en mesure de réaliser leur stage en raison de la crise sanitaire ne soient pas pénalisés et obligés de redoubler, il serait pertinent de mettre en place les mesures suivantes :

• Un soutien à la recherche de stage : une cellule dédiée par établissement via une hotline sera ouverte pour aider à la correction des CV et lettres de motivation, et assurer un suivi personnalisé pour ceux qui sont en plus grande difficulté. Cette cellule permettra aussi d’assurer la signature des conventions de stage dans les délais demandés. Cette cellule pourra aussi s’appuyer sur le réseau des alumni de l’établissement.

• Une flexibilité pour valider l’année scolaire : l’établissement pourra proposer d’allonger la période de recherche de stage. Le fait de ne pas trouver de stage sur l’année scolaire 2020 ne devra pas être une raison de non-validation de l’année.

• Une autorisation de faire des stages dans des structures diverses : la notion de stage doit s’étendre au monde du bénévolat et de l’association et ne plus être restreint à l’entreprise.

• Favoriser l’alternance et l’apprentissage : les universités pourront aussi proposer de changer le format du parcours supérieur en favorisant l’alternance dans une entreprise ou dans une association. L’alternance et l’apprentissage sont parmi les meilleurs moyens pour mettre en pratique l’enseignement et découvrir le monde du travail au plus vite.

• Étendre l’âge des services civiques et volontariat : l’année étant considérée comme blanche pour certains, nous proposons de prolonger la limite d’âge du service civique de 25 ans à 29 ans et pour le Volontariat International en Administration (VIA) d’étendre la limite d’âge d’une année, soit jusqu’à 29 ans. Concernant les Volontariats Solidaires à l’étranger, un début en France pourrait être envisagé en attente de la ré-ouverture des frontières.

• Changer les statuts des contrats armées-jeunesse : de la même manière, les contrats armées-jeunesse seraient étendus aux jeunes âgés de 29 ans, aujourd’hui limités à 27 ans.

• Créer des contrats avec d’autres Ministères que celui des Armées : les contrats armées-jeunesse sont des stages et contrats proposés dans le but de concourir au renforcement du lien armées-nation, et de mettre en contact des étudiants avec le milieu de la Défense par l’intermédiaire de l’industrie de l’armement, des états-majors, des unités militaires et des différents services des armées. Ce type de format pourrait être appliqué au sein d’autres ministères comme celui de la Santé ou des structures médicales publiques.

• Les Erasmus : Les Erasmus ne doivent pas être sacrifiés, le report sur une année peut être envisagé en collaboration avec les universités partenaires.

3. Pour les étudiants qui arrivent sur le marché du travail, la problématique principale reste l’offre d’emploi qui sera diminuée suite aux conséquences de la crise sanitaire.

La transition entre l’enseignement supérieur et le marché du travail risque d’être compliquée pour les 700 000 étudiants français qui achèvent leur formation initiale en 2020.

Nous proposons :

• D’étendre le statut d’étudiant à une année supplémentaire : le statut d’étudiant pourra permettre aux jeunes de trouver au moins un stage si l’offre du marché du travail est gelée.

• De changer les statuts du Volontariat International d’Entreprise en France (VIE) : l’objectif serait de faire commencer les VIE en France, en attente de l’ouverture des frontières et d’allonger d’une année, pour avoir un âge limite à 29 ans.

• Des propositions mi-temps : un contrat post Covid-19 pourrait être proposé par les entreprises avec un format à mi-temps.

• Du télétravail : la génération Covid est capable de travailler à distance et d’utiliser les outils informatiques. L’idée de commencer une première embauche à distance ne doit pas être un frein à l’emploi.

***

La crise du COVID-19 a permis de mettre en lumière que l’enseignement supérieur devait passer au “tout numérique” d’un point de vue administratif. Concernant l’enseignement, cette crise a introduit de nouvelles méthodes innovantes dans la façon d’enseigner. Sans nul doute, en sortie de crise, les formations à distance se multiplieront, celles-ci ayant déjà montrées plusieurs avantages comme celui de pouvoir étudier et travailler en parallèle, de reprendre des études à tout âge et n’importe où dans le monde, ainsi que d’éviter aux étudiants de nombreuses heures de transports.

La définition de l’enseignement digital devra être vigilante au maintien de la cohésion et du lien entre enseignants et étudiants. De plus, la jeune génération y voit un avantage, qui est celui de se familiariser avec les outils informatiques, largement utilisés au sein des entreprises.

Il en va de même pour les jeunes diplômés qui feront leur entrée dans le monde du travail de manière digitale. L’entreprise et les jeunes diplômés devront redéfinir ensemble les principes d’intégration et de cohésion d’équipe qui ne se fera pas forcément, de prime abord, en présentiel.

Toutes ces propositions reposent sur une bonne coopération et coordination du trinôme État, enseignement supérieur (et ses étudiants), et entreprise. Le trinôme devra aussi être vigilant à ne pas sacrifier les générations qui ne peuvent faire des formations à distance, par exemple les formations manuelles, dont certaines entreprises sont très demandeuses.Il faudra innover ensemble. Il faudra soutenir certaines formations qui seront touchées par la crise économique. Il faudra apprendre autrement, tant à l’échelle des jeunes que de leur futur employeur.

Il faut donc utiliser cette crise pour accélérer l’adaptation de l’enseignement supérieur à un monde dominé par les outils numériques et, surtout, ne pas sacrifier une génération entière.

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