Synopia a le plaisir de présenter sa 22ème note dans laquelle Bruno Cathala, premier Greffier de la Cour pénale internationale (2003-2008) et membre du conseil d’administration de Synopia, revient sur l’impact de la guerre en Ukraine sur la justice pénale internationale.
Il repose la question du sens donné au mot justice notamment en situation de conflits.
En effet, la justice, c’est n’est pas agiter un totem de manière incantatoire. Vouloir la justice, comme l’a exprimé le gouvernement ukrainien avec la plus grande détermination depuis le début de cette guerre, c’est attendre des décisions effectives qui relèvent les défis de son temps, c’est rencontrer des institutions à la bonne échelle qui répondent à ses attentes ; en bref, vouloir la justice est à la fois un espoir et une exigence.
Cette exigence est d’abord celle que l’on a vis-à-vis de l’action des juridictions internationales, spécialement de ses procureurs, pour qu’elles tiennent, dès à présent, les promesses inscrites dans leurs Statuts, mais elle s’adresse aussi à la communauté des juristes pour qu’elle imagine d’ores et déjà ce que sera le droit de demain et qu’elle invente une justice efficace devant laquelle les criminels devront rendre des comptes. C’est à cette injonction de créativité que nous voudrions ici essayer de répondre.
Le défi de la justice pénale internationale largo sensu consiste, à la fois, à jouer le rôle qui lui est dévolu dans un monde territorialisé – à savoir régler les conflits entre les nations –, et à saisir la dimension que l’on pourrait qualifier d’apocalyptique du conflit en cours en raison des dégâts, parfois quasi-éternels, qu’il engendre sur les écosystèmes.
Cette note n’a pas la prétention de définir la justice internationale, mais simplement celle d’ouvrir le débat auquel Volodymyr Zelensky assigne la communauté internationale des juristes par la confiance qu’il manifeste dans la justice depuis le début du conflit. Sommes-nous capables de répondre à cette injonction d’imagination : trouver des réponses concrètes et efficaces à un « anormal », jamais pensé auparavant, que produit chaque nouvelle guerre ? autrement dit la justice pénale internationale sera-t-elle au rendez-vous de son temps ?