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Si le mot « confinement » a été sur toutes les bouches ces dernières semaines, c’est son contraire qui, aujourd’hui, préoccupe les dirigeants du monde entier. Comment en effet organiser le déconfinement sans risquer de provoquer un regain de l’épidémie et une nouvelle saturation de nos hôpitaux ? Comment déconfiner sans toutefois perdre les bonnes pratiques du confinement (distanciation sociale, gestes barrières, télétravail, etc.) ? Faut-il procéder à un déconfinement progressif, par régions, par départements, par classe d’âge, par individu (les immunisés et les autres) ?
Autrement dit, qui déconfiner, quand et comment ?
Les Français attendent une stratégie gouvernementale du déconfinement. Il n’existe sans doute pas de stratégie optimale. Mais quelle que soit la voie choisie par l’exécutif, celle-ci devra prendre en compte un certain nombre de points de vigilance susceptibles de faire partie d’une doctrine de déconfinement, et qui sont nécessaires à la réussite sur le long terme du processus de déconfinement et de sortie de crise, et à son acceptabilité par la population française.
Sur le plan opérationnel, l’enjeu du déconfinement s’articulera autour de deux axes : vitesse d’exécution et sécurité sanitaire. Par-delà les pistes déjà sur la table (géographie, âge) et les outils (recours à l’IA, traçage), les scénarios de déconfinement vont, pour l’essentiel, dépendre des quantités d’équipements de protection dont la France disposera au cours des prochaines semaines, de sa capacité à tester les populations à grande échelle, et des traitements disponibles.
Dans tous les cas, seul un retour progressif à la « normale » peut être envisagé. Mais là encore, la stratégie se devra d’être claire. Car pour réussir à sortir de l’ornière de la pandémie du mieux possible, les entreprises auront besoin de visibilité, d’accompagnement et de sécurité.
Enfin, dans ce document, nous présentons une simulation de déconfinement, organisée en cinq phases, qui expose le rôle de la puissance publique et donne une idée des secteurs, les uns après les autres, qui pourraient reprendre leur activité.
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SYNTHESE DES POINTS DE VIGILANCE
- La France est et restera une démocratie
- La France est et restera une République
- Un narratif de la reconstruction devra remplacer celui de la pandémie
- Le plan de sortie de crise devra être juste, compris de tous, réaliste et supportable
- La France est grande de ses talents
- Anticiper et favoriser la reprise économique aux bons niveaux de gouvernance
– Rôle des maires et des préfets
– Rôle des corps intermédiaires et des organisations syndicales - Préserver l’équilibre nécessaire entre sécurité sanitaire et redémarrage de l’activité économique
- Sécuriser le risque juridique pour les entreprises
LES 3 SCÉNARIOS DE DÉCONFINEMENT
Trois configurations se présentent, chacune aux conséquences très différentes sur le scénario qui sera mis en oeuvre. Sachant que chaque scénario sera conditionné par CINQ inconnues (à ce stade de la réflexion) dans l’équation :
– Notre pays dispose d’assez de masques, de gants et de gel pour l’ensemble de la population.Ou pas.
– Notre pays dispose de la capacité à tester l’ensemble de la population dans un délairaisonnable. Ou pas.
– Notre pays dispose d’un traitement efficace (chloroquine ou autre) pour empêcher le développement de la charge virale dès lors que les premiers symptômes apparaissent. Ou pas.
– Un recours à l’IA et au Big data est décidé pour « tracer » les populations.
– L’invention d’un vaccin.
Chacune décrit les conditions matérielles qui vont assurer la sécurité des phases de déconfinement. Chacune peut être mise en oeuvre de façon simultanée dans le pays, ou par région. Et être complété par des mesures d’âge et de sélection selon l’immunité.
- Configuration « Longue nuit »
- Configuration « Entre chien et loup »
- Configuration « Plein jour »
SIMULATION DE REPRISE, EN 5 ÉTAPES POUR LES ENTREPRISES
Selon que nous serons dans la configuration 1, 2 ou 3, et selon le niveau « d’inconnues », le retour à la normale sera plus ou moins long. Afin de nourrir la réflexion sur le calendrier de sortie de crise, et en nous inspirant des points de vigilance évoqués dans cette note, nous nous sommes livrés à un exercice.
Cette simulation concerne les configurations 1 et 2. Il sera toujours temps d’aller plus vite si les conditions de la configuration 3, la plus favorable, se réunissent. Il convient bien sûr de distinguer le cas des entreprises qui sont en contact avec du public, ce qui accroît le risque sanitaire, et les autres (services, B to B) dont l’activité peut se poursuivre un temps en combinant dans de bonnes conditions reprise sur site et télétravail.
Les critères de taille méritent eux-aussi d’être intégrés dans l’équation car les problématiques ne sont pas les mêmes selon que dix ou dix mille personnes travaillent ensemble. Enfin, une attention particulière doit être accordée aux TPE-PME dont beaucoup avaient déjà une trésorerie très tendue avant la crise.
CONCLUSION
Le déconfinement sera une entreprise délicate et compliquée à mener. Quelles que soient les mesures et les stratégies déployées, elle ne pourra être réussie sans le concours actif des citoyens. En d’autres termes, si les individus ne se sentent pas responsables du déconfinement en adoptant un comportement adéquat et en témoignant leur confiance dans les autorités (nationale et locale) en charge du déconfinement, s’ils ne jouent pas le jeu, la sortie de crise sera vraisemblablement plus longue et plus ardue.
Mais, plus encore, cette phase de déconfinement creusera le sillon qui sera suivi pendant les prochaines années. Les décisions qui seront prises alors, les valeurs qui sous-tendent ces choix, les méthodes retenues, marqueront durablement le fonctionnement du pays. L’exercice des pouvoirs, la préservation des libertés fondamentales, l’équilibre entre groupes sociaux et géographiques, la place des experts dans la décision publique, sont quelques-uns des points sur lesquels la vigilance s’impose car le pli pris pendant cette période s’imposera pendant de nombreuses années.
On l’a vu en 1945. Ce sont les grandes décisions prises à la Libération qui ont produit leurs effets pendant plusieurs décennies. Ces décisions ont été acceptées, et ont profité à la France parce qu’elles étaient le fruit d’un consensus des forces démocratiques, parce qu’elles étaient fondées sur une analyse sans complaisance des causes de la situation, et parce que, très rapidement, les hommes capables de mettre en oeuvre le programme ont été choisis sur le seul critère de leur compétence et de leur loyauté.
La situation est différente, c’est certain. Mais les conditions nécessaires au retour de la confiance et à l’établissement d’un nouvel équilibre durable sont, mutatis mutandis, en grande partie les mêmes.